À peine elle achevait cette prière, que ses membres s’engourdissent.
Une écorce légère enveloppe son sein délicat. Ses cheveux verdissent en feuillage, ses bras s’allongent en rameaux. Ses pieds, naguère si rapides, prennent racine et s’attachent à la terre. La cime d’un arbre couronne sa tête. Il ne reste plus d’elle-même que l’éclat de sa beauté passée. Apollon l’aime encore, et, pressant de sa main le nouvel arbre, il sent, sous l’écorce naissante, palpiter le cœur de Daphné.
Il embrasse, au lieu de ses membres, de jeunes rameaux, et couvre l’arbre de baisers que l’arbre semble repousser encore : «Ah ! dit-il, puisque tu ne peux devenir l’épouse d’Apollon, sois son arbre du moins. Que désormais ton feuillage couronne mes cheveux, ma lyre et mon carquois. Tu seras l’ornement des guerriers du Latium, lorsqu’au milieu des chants de victoire et d’allégresse, le Capitole verra s’avancer leur cortège triomphal. Et de même que ma longue chevelure, symbole de jeunesse, sera toujours respectée des ciseaux et des ans, je veux aussi parer ton feuillage d’un printemps éternel».
Il dit, et le laurier, inclinant ses jeunes rameaux, agita doucement sa cime. C’était le signe de tête de Daphné, qui acceptait les faveurs d’Apollon.
D’après Apollon et Daphné, in Les Métamorphoses, Ovide.